Le jujube est un objet habituellement inscrit dans la catégorie du manger. Il est fait de substances souvent inconnues, aux textures et aux couleurs si improbables, qu’elles apparaissent peu naturelles et potentiellement radioactives. Il n’est sans doute pas étonnant que les jujubes se retrouvent dans l’univers de Futur intérieur, percée du TPE dans la science-fiction.
Le jujube évoque aussi la multiplicité. Sur scène (comme à la maison, d’ailleurs), on le mange en grande quantité et généralement de façon compulsive. Le caractère incontrôlé du geste contribue sans doute à accentuer son caractère sacrificiel. Comme l’écrivait René Girard dans La Violence et le Sacré, il faut un bouc émissaire pour que le groupe, secoué par la violence, retrouve le calme.
Dans Petit bonhomme en papier carbone, c’est le père d’Éthienne, devenu un Kronos mythologique, qui dévore ses enfants représentés par des jujubes au coke.
Dans une version low-fi de Futur intérieur que peu de gens auront vue – malheur à vous –, ce sont les mythiques framboises en gelée qui deviennent des clones des personnages. Quand un des Robert – tous les personnages s’appellent Robert – avale naïvement un des clones comme s’il s’agissait d’un vulgaire bonbon, ses confrères se laissent glisser avec lui dans le tabou cannibale. Aucun doute, la transgression est jouissive.
En conclusion, le jujube est un animal sacrificiel comme un autre, ce qui nous rappelle que la gelée est d’abord de la chair hydrolysée.