Un thermos, peu importe lequel, à sa simple vue, me rappelle l’odeur du café filtre et mon père, tôt le matin — il a toujours été le premier levé — qui range ce récipient dans sa boîte à lunch avant de partir à l’usine où il a travaillé presque toute sa vie.
Ce même thermos, parfois, il l’ouvrait en revenant du travail, sitôt sorti de sa vieille Buick verte et buvait sa boisson en se servant du couvercle comme tasse. Il finissait son café tiède, le dos collé au char en fumant une cigarette et en regardant nulle part. Profitant un peu de l’extérieur, de l’odeur du gazon coupé, avant d’aller s’enfermer à nouveau, s’encabaner… Et nettoyer le thermos pour le lendemain.
Une fois par année, ce thermos sortait de sa routine et transportait le jus chaud ailleurs, loin de l’usine, tout près des lignes… Je me demandais d’ailleurs à quoi pouvait bien ressembler ces lignes infranchissables. Le thermos se retrouvait à l’expo agricole de Bedford et voyait mon père allègre, allégé de sa redondance, souriant, se réchauffant au café chaud qui n’avait plus exactement le même goût, cette fois, pendant que son fils souriant, lui aussi, buvait du Coke froid sortant de la glacière.